06 septembre 2025

Poussière du temps / L'Entille

 


Dans la galerie du coin de la rue, je flâne. J’aime remonter le temps au travers du quotidien ou de l’exceptionnel parfois. Rarement. C’est une balade au fil du passé, au fil d’autres vies. Des vies à inventer, à improviser.

Il y a là, dans les bacs, des photos de famille, mariage, baptême, communion, etc.., des moments de réunion, de liesse oubliés. Ces gens ne sont plus là depuis longtemps mais leur image a perduré. Leurs descendants ne les reconnaîtraient sans doute pas. Des photos de voyage cohabitent allègrement aussi avec des œuvres très personnelles.

 

Il y a aussi des objets qui ont eu une vie avant d’arriver dans ce capharnaüm. Ils ont été choisis, achetés, offerts. Ils ont orné des étagères, des buffets, embelli des intérieurs, réjoui des yeux. Ils ont suivi chaque instant de d’une existence.

Dans ce méli-mélo de genre, Molière donne la réplique à Don Quichotte. L’art ethnique lointain côtoie l’art de la table bourgeois. Un chat me surveille de son perchoir. « Pas touche ! » a-t-il l’air de me dire lorsque je m’approche d’une table dressée, prête à recevoir les invités attendus. Une médaille posée dans une assiette comme un gage de lien indéfectible. Et cet indéfectible se retrouve là, exposé, évalué, estimé, prêt à voler vers un autre gage d’amour, un autre engagement.

 

Lorsqu’un homme s’approche de moi d’un air un peu excédé : « Vous cherchez quelque chose en particulier ? » me demande-t-il. Ça doit bien faire une heure que je traîne entre les meubles, objets, que je scrute chacun d’eux avec sérieux et un brin de suspicion. « En ai-je envie ? Me fait-il de l’œil ? L’achèterais-je ? Où le mettrais-je ?  » J’aime bien me poser ces questions. Rares sont les fois où j’atteins l’achat pourtant. Je crois que j’aime surtout la déambulation dans des histoires poussiéreuses. Imaginer les pérégrinations des choses ici exposées. Je lui fais mon plus beau sourire avant de lui répondre : « Vous avez un très beau magasin, mais je n’ai pas trouvé mon bonheur». Et lorsque je m’en vais, la clochette de la porte émet le son guilleret avec lequel elle m’a accueillie. 

 


3 commentaires:

  1. La fin légère tire la langue à l'atmosphère poussiéreuse, j'aime beaucoup.

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  2. il y a une boutique du genre qui vient de s'ouvrir près de chez moi, on s'y croirait ;-) jill

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  3. Ben au moins tu as tiré le bonhomme de sa léthargie !

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