06 septembre 2025

Pour la postérité / J.Libert

 



                                 

     Quand Don Quichotte et Sancho rentrent au village, ils sont fatigués de leurs exploits. Ils ont, certes, vu du pays, des civilisations différentes : celle du Mexique Aztèque ou des îles Martiniquaise, Polynésienne. Ils ont côtoyé des notables et des rois.
 
    Don Quichotte  a défendu la veuve et l’opprimé à coups d’épée détruisant les moulins à vent et les dragons menaçants. Il a fait de Dulcinée à qui il avait juré amour et fidélité, la dame de ses pensées.
 
    Tous deux sont nostalgiques de tout ce chemin parcouru, peut être en vain. Ils ne rêvent plus que d’une flamme dans l’âtre sous l’œil énamouré de leur animal domestique, que d’être réconfortés par la chaleur et l’odeur d’un bon café.
 
    Mais leur mission ne va pas s’arrêter là. Trois siècles plus tard, on leur demande de poser pour la postérité en leur érigeant un monument de bronze.
 
    Alors, une dernière fois, ils repartent à l’aube, à l’heure où la fraîcheur emplit les buissons, où les oisillons dorment encore sous l’aile chaude et soyeuse de leur mère. Aujourd’hui, on peut admirer leur statue sur la place d’Espagne à Madrid ou à Bruxelles.
 
    Dans sa brillante tenue de métal, Don Quichotte, le chevalier errant, vient d’enfourcher son cheval : Rossinante. Tandis que son bras droit pointé vers l’horizon indique la route des Moulins, sa main  gauche tient fermement l’épée. Son maigre visage émacié, buriné, son grand corps sec expriment toute sa détermination tandis que ses yeux sculptés dans la profondeur du bronze  reflètent de sombres hallucinations.
 
    Le noble et valeureux chevalier a fière allure, tout entier pétri d’idéaux improvisés contre une réalité beaucoup plus prosaïque.
 
    À quelques mètres de lui, trottine Rucio, la mule de Sancho. Elle s’apprête aussi au départ. Où qu’il aille, Sancho, rustique paysan, inculte, suit son maître.
 
Quand le soleil sera à son zénith, notre utopique combattant, suivi de son acolyte obéissant, rutilera de tous ses bronzes sur un piédestal, figés, statufiés dans la célébrité d’un destin exceptionnel.
 
                                                                                                                                            

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