28 septembre 2024

Réminiscences / J. Libert

 



Il promenait son regard sous la voûte étoilée. Ses yeux, tels un astrolabe, s’attardaient sur ses constellations préférées ; elles ressemblaient à des milliers de diamants posés sur un écrin de soie aussi noire que l’ébène.

 La chaleur, les bruits ordinaires, ceux des camions dans la rue passante ou, parfois, une angoisse inconsciente à laquelle Paul ne savait pas donner de nom l’empêchaient de trouver le sommeil. Alors, il quittait le lit et ses édredons, endossant son vieux manteau marin, son sac à dos et s’abîmait là, les nuits d’été, dans la contemplation, assis sur son vieux banc de pierre.
  
 Pèle mêle, lui revenait en mémoire, les images d’une vie plus aventureuse, sa vie d’avant : celle où il partait en mer, selon un calendrier précis, plusieurs jours ou semaines, pêcher dans les eaux froides des mers d’Islande, au pays des Vikings, à bord de son chalutier : « La belle Marie ».
  
 À chaque départ s’invitait chez lui le même émerveillement, la même émotion quand le bateau prenait son élan et sortait du port. Des écharpes d’écume blanchissaient en gerbes après le passage de celui ci. Paul regardait le soleil se lever sur la mer et colorer l’horizon de traînées écarlates.
 
 Des bancs de poissons aux écailles rutilantes apparaissaient en rase motte à la surface des vagues tels des éclairs éblouissants ; affolés par le bruit des moteurs, ils s’éteignaient dans les anfractuosités des rochers pareilles à des trous de  souris.
 Paul savait déjà que la pêche serait abondante.

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