05 novembre 2022

Pourquoi j'écris / K

POURQUOI J’ÉCRIS est un très bon sujet, sans doute idéal pour se confier un peu et faire que nous nous connaissions mieux les uns et les autres, mordus assidus enragés de cet atelier.

Je le mets volontiers à profit, je vous préviens, je serai plus long que d’habitude, si vous avez repéré mon appétence pour les textes plutôt brefs !


 

 

J’écris parce que j’en ai envie.
J’écris parce que j’aime ça. 
J’écris parce qu’un jour à l’école il y a eu un déclic, un déclenchement en deux temps.

Deux chocs successifs pour l'écriture. J'étais en CM2 donc puis en 6e. 

Je me rappelle fort bien l'ennui incommensurable, le désintérêt profond que j'éprouvais pour ces satanées rédactions. Le supplice pour arriver à aligner deux mots vaillants.  Et puis, un jour, le maître nous donne comme sujet le résumé d'un livre qu'on a bien aimé. Et là, ça me parle. 

Alors voilà, ce jour-là, je me suis mis à résumer le Comte de Monte-Cristo. Deux pages du petit cahier, je me rappelle le boulot, parce que « je ne vous raconte pas » (enfin si !). Petit inconscient, quelle affaire ça a été de faire tenir tout ça en deux pages ! Mais j'y suis arrivé. Me surprenant moi-même en plus du maître !

L'année suivante, autre déclic, avec la prof de Français au collège. 
Même topo, toujours l'ennui et puis le sentiment des profs que je pouvais mieux faire (ben tiens !).  
Un jour elle nous donne un sujet d'enfer. En tout cas qui me parle.  
Imaginer un nouvel épisode des aventures de Tartarin de Tarascon, qu'on venait de lire.  
 
Et là, nouveau déclic.
Je me rappelle avoir inventé une histoire où Tartarin, fanfaron, se fait percer à jour. 
Il raconte une histoire à dormir debout, ça se passe dans une diligence dont un passager sait que Tartarin ment.

C'est lui l'auteur réel de l'exploit, malchance donc pour Tartarin qui se fait traiter de "mystificateur". Je me rappelle très bien avoir utilisé ce mot que j'avais lu auparavant dans une BD ! Et Tartarin se fait expulser de la diligence ! 

Pareil, grand moment inespéré, la prof qui me file une bonne note, qui n'en revient pas...moi non plus ... Tiens, puisque j’y suis, je peux même révéler, parce que cela me revient et que je ne l'ai pas dit, que j'en étais un peu amoureux (une brune, ses jambes, elle s’habillait court, bref... !) et qu'elle avait le jour de Tartarin pris le parti de venir s'asseoir près de chacun pour faire le point dans la phase d'écriture, avec le risque que l'élève (alias bibi) se retrouve rouge pivoine, atrocement gêné par cette proximité jamais imaginée une seconde. 

 
Quand j'y repense, j'avais trouvé et ouvert une porte en ces deux occasions. 
Mon rapport à l'écriture vient peut-être pour partie de là.  
Et la porte ne s'est jamais refermée.   

Et donc, depuis…

J’écris parce j’ai toujours un stylo sur moi.

J’aime écrire et c’est devenu courant, normal, je le fais comme si je partais me promener, comme si je me mettais à bricoler, ou courir, ou faire du vélo, ou comme si j’allais à la pêche.

J’écris parce que j’ai acquis une certaine assurance pour le faire. 

J'écris tranquillement sans rêver d'écrire un roman et sans intention aucune d'être publié.

J’écris parce que j’aime aussi essayer de faire rire.  

J’écris pour être lu mais pas seulement, je continue si je ne le suis pas.  

J’écris parce que les mots et moi c’est une longue histoire et un travail d’équipe.

J’écris parce que j’aime jouer avec les mots, même si parfois ils se jouent de moi.

J’écris parce que c’est moins loin.

J’écris parce que c’est -parfois- plus profond.

J’écris parce que j’aime ce qu’a écrit Orhan Pamuk « J’écris pour être heureux. »

J’écris parce que les paroles s’en vont.

J’écris parce que j’aime les auteurs de l’Oulipo.

J’écris parce que dans les ateliers d’écriture on peut partager, échanger à partir d’une contrainte. J’y écris parce que j’en aime le processus, le thème et la contrainte nous obligent, et poussent dans des retranchements auxquels on ne peut se soustraire.

J’écris parce que c’est mon laboratoire, mon jardin, ce n’est pas secret mais discret.

J’écris parce que j’aime bien chercher, inventer, imaginer, que je m’intéresse toujours à la question de « savoir arrêter », garder des trous, ranger sa pelle, ne pas trop polir pour être honnête, couper court, ne pas trop en faire.

J’écris parce que j’aime aussi ce qu’a dit Borges : « J’écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps ».

J’écris parce que j’aime l’improviste qui surgit, c’est ce qui tombe sous la main qui passe par la tête…

J’écris parce que tout est possible.

 

.  

 

 

 

11 commentaires:

  1. vegas sur sarthe5 novembre 2022 à 16:35

    les jambes d'une brune ou le décolleté d'une blonde, ça fait toujours des souvenirs...

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  2. Voilà de belles révélations sur ton rapport à l'écriture ! Ah... la prof de français... moi aussi j'ai vécu ça... que de souvenirs qui remontent en surface !
    margi

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    1. Un plaisir. Et, en y repensant, je ne me souviens d'avoir éprouvé par la suite de la scolarité de telles émotions envers le "corps" professoral ;-)
      K

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  3. J'aime bien ce travail d'équipe avec les mots et la manière dont tu l'évoques. Merci K.

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    1. Merci Mony, manière de dire que les premiers mots qu'on pose, et même les suivants, en appellent d'autres !
      K

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  4. et tu sais faire partager ta passion ! emma

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