19 octobre 2024

LE VOYAGE DES ÉLÉPHANTS / J.Libert

 



    L’œil de Pablo, photographe animalier, observe la photo de l’éléphant aux couleurs chatoyantes qui trône sur le mur de son salon. Elle lui rappelle ce qu’il distinguait, il y a encore quelques semaines, à travers la lunette de son objectif, là bas, sur les dunes de sable cuivré Africaines.
 
    On était à l’heure de la sieste. Tous les animaux sauvages dormaient, épuisés de chaleur. Dans l’air  épais et brûlant, aucun oiseau ne trouait l’espace de peur de flamber en plein vol.
 
    Mais, tandis que la vie se retirait sur les crêtes rougeoyantes,les éléphants, regroupés en nombre important, dessinaient une immense tache noire dont les contours se formaient et se déformaient imperceptiblement au gré de leurs avancées.
 
    Lents et pacifiques, massifs, puissants, ils creusaient, derrière eux, un sillon sablonneux effacé par le moule de leurs pieds larges et lourds.
 
    Pablo regardait à travers sa lunette, tout au loin, à l’horizon, évoluer cette ligne sombre et il put bientôt distinguer toute la hiérarchie des pachydermes. Tous ne progressaient pas au même rythme. Souvent, les éléphanteaux se perdaient entre les pattes de leurs aînés ou s’attardaient un peu trop longtemps près des arbrisseaux plein de senteurs nouvelles au risque de devenir la proie facile de félins chasseurs en quête de nourriture.
 
    À cette heure, ils avaient soif et se dirigeaient de concert vers le fleuve.Avec leur longue trompe souple, les éléphants aspiraient l’eau et la rejetaient en jet puissant sur leur dos poussiéreux. Leurs petits yeux s’animaient, surveillant les alentours, protégés par leurs larges oreilles en éventail. La toilette terminée, certains en barrissaient d’aise.
 
    Puis, infatigables, ils reprenaient leur marche, en file indienne, vers leur pays natal, là où les attendaient des forêts de fruits mûrs et les eaux fraîches des glaciers.
 
   Et tandis que l’imposant troupeau se noyait à l’horizon, les dunes de sable flamboyaient au soleil couchant.
 

2 commentaires: