Il y avait dans notre village un jardinier mutique, les gens disait de lui qu’il avait avalé sa langue, mais moi je sais que ce n’était pas vrai. Une fois que je lui tirais la langue derrière le dos de ma mère, il me répondit de même. Je n’avais encore jamais été confronté à un adulte qui faisait ça. Il m’a fait peur ce jour-là.
Il travaillait d’arrache-pied dans les jardins à arracher les pieds des herbes de la pampa qui s’en donnaient à cœur-joie chaque automne en délayant dans le vent leurs graines volatiles.
Un soir que je rentrais de l’école, je l’ai croisé sur le chemin, tiré à quatre épingles, ses souliers cirés jusqu’à se voir dedans, une cravate bleue serrait son cou tandis que son costume noir mettait en valeur sa haute taille. Cet homme toujours silencieux s’était mis sur son 31, mais pourquoi ? Ni une ni deux, je me suis mis en mode filoche, comme ils disent dans les polars. Je l’ai vu s’arrêter au 17 de la rue des lilas, là où habite la belle Hortense, fleuriste de son état. Il frappa à la porte et attendit. Il n’y avait aucune tension chez lui, ses mains ne tremblaient pas, elles pendaient le long de son corps tranquilles, un bouquet de jonquilles dans l’une d’elles. Lorsque Hortense ouvrit la porte, il ôta son chapeau, oui il portait un chapeau de feutre et entra après que la dame l’y ai invité. Du haut de mes huit ans, je ne comprenais pas pourquoi cette mise en scène alors je suis rentré à la maison en courant et j’ai tout raconté à ma mère. Elle m’a expliqué que c’était une demande en mariage en bonne et due forme. Ah non ! Pas lui ! Moi je suis amoureux de Capucine, la fille de la fleuriste, je n’en veux pas comme beau-père ! J’espère qu’il va se prendre un râteau.
Mais le lendemain je suis passé chercher Capucine pour aller à l’école. Toute joyeuse elle m’a annoncé que sa mère allait se marier avec le jardinier et elle trouvait ça très cool et très drôle. Un jardinier et une fleuriste, ça ne peut que matcher, elle me dit ! Rrrrrrrrrrrrr, j’en aurais mangé mon chapeau comme disait mon grand-père. Elle a vu ma tête de six pieds de long et elle m’a invité au mariage « Et tu seras mon chevalier servant » qu’elle a ajouté en riant et je suis devenu tout rouge comme une pivoine.
un texte fleuri et bucolique soyez tous heureux.
RépondreSupprimerOui, joliment fleuri ce texte !
RépondreSupprimerKeremma