Le Nil ne coule plus
Il pleure.
Ses eaux jadis nourricières
Sont devenues des larmes lentes
Des soupirs liquides qui caressent les fondations profanées
Des pyramides pillées sous prétexte de science.
Ils sont venus gantés de savoir et de certitudes
Avec leurs pinceaux
Leurs carnets
Leurs monocles d'érudits
Et ont arraché aux pierres ce qui ne leur appartenait pas.
Ils ont nommé cela "archéologie "
Comme on nomme la violence "exploration ".
Mais les pyramides savent.
Elles sentent sous leur peau de calcaire
Le vide laissé par les trésors dérobés
Les amulettes arrachées
Les sarcophages exilés
Dans les musées qui se prétendent temples du savoir
Et ne sont que vitrines de l'oubli.
Le fleuve lui n'oublie pas.
Il serpente entre les ruines comme un témoin muet
Portant sur son dos les fragments d'une mémoire brisée.
Chaque vague est une plainte
Chaque reflet une accusation.
Et dans le silence du soir
On peut entendre les pierres murmurer :
《 Ce n'est pas l'or qu'ils ont volé
C'est notre histoire
Notre souffle
Notre droit au mystère. 》
Lorsque la mémoire est pillée
Le silence devient sacré
Et le fleuve apprend à pleurer
À la place des morts

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