Aucune interruption pendant les fêtes !
On compte sur vous !
Amitiés
le concert
Les spectateurs étaient installés, les oreilles largement déployées, l’attention
était à son comble.
Dans la vieille forteresse, ainsi
nommée car la vieille église était bâtie avec les pierres du château moyen âge,
huit compères sexagénaire au
demeurant, amis comme cochon depuis la maternelle avait organisé un concert
pour la saint Sylvestre. Ils étaient fins prêts.
L’idée, aussi sotte que grenue, avait germé dans l’esprit de Jean alors
qu’il écoutait la fantaisie de
Schubert, tandis qu’il tournait la sauce tomate bolognaise avec sa cuillère en
bois transformée pour l’occasion en baguette de chef d’orchestre.
Contactés, les sept autres énergumènes avaient de suite souscrit à la
proposition de Jean, histoire de s’amuser.
Ou mais quels instruments ? et où ? Mais bon sang mais c’est bien sûr, la vieille
église un vrai palais pour l’acoustique. Et puis cela lui redorerai le blason, la
remettrait au centre du village. On ne va pas se mentir, la messe n’est plus ce qu’elle
était ; elle ne fait plus recette. Depuis longtemps les curés sont des
baladins itinérants qui colportent la bonne parole de village en village.
Bon le lieu trouvé, quels instruments. Nos compères sont une équipe de
bras cassés qui, s’ils entendent la musique ne savent pas l’interpréter. Et puis
quelle œuvre ?
Le Boléro ? La fantaisie de Schubert ? Ah non sécrièrent en choeur Anastase, Fuschia et Zozine. Le 31 décembre, c'est le "Beau Danube bleu" ou la Marche de Radetzky".
Protestation d’Urbain
et Timoléon qui préféraient le concerto pour violoncelle de Saint Saëns ! Finalement
c’est Jean qui en chef d’orchestre eu le dernier mot. Il choisit un œuvre de
Poulenc en hommage au petit poulain né la nuit dernière et baptisé Francis.
Dans la sacristie, on
dégotta une vieille harpe bien désaccordée mais qui ferait l’affaire.
A vingt heures pétantes :
Jean, baguette en main accueillit les musiciens en son palais musical
Procule lui ne sachant
que siffler avait attrapé le sifflet ultrason
ce qui fit venir le chien Dodo qui aboya joyeusement.
Fuchsia arriva avec une
casserole et une louche en cuivre et tapa généreusement imaginant la tête de
son époux volage.
Eubiote égrena
quelques notes aigrelettes à la harpe qui eut envie de sortir de ses gonds
(harpe à gonds) bien sûr.
Quant à Zozine, elle étala
sa collection de verres plus ou
moins rempli d’eau actionnée de quelques goutte eau de Javel pour imaginer qu’elle était bénite et tapotait sur le
faux cristal avec fourchette et couteau.
Timoléon se déclara ténor e fut
accompagné d’Anastase en chœur.
Sans aucun doute un orchestre
naquit cette nuit là !
Ce matin, Germaine
chante du Souchon ...
Est-ce qu'on peut
ravoir à l'eau de Javel
Des sentiments
La blancheur qu'on croyait éternelle
Avant ?
Je n'aime pas
quand elle chante Souchon, ça finit toujours par monter dans les tours, dans
les aigües.
Je fais souvent ce
rêve fou qu'elle parle en ultrasons !
Certes ça fait
aboyer son caniche et ça casse quelques verres en cristal – cadeau de
mariage d'oncle Hubert... au siècle dernier
– mais j'ai une paix royale.
Pour retrouver le
rose initial
De ta joue devenue pâle
Le bleu de nos
baisers du début
Tant d'azur perdu
Question baisers
je me souviens qu'au début elle m'avait donné Huit … sur vingt, alors
pensez-donc aujourd'hui je suis hors catégorie.
Pourtant à
l'époque j'y mettais de la fantaisie … je lui jouais de la harpe
avec ma guitare sèche (cadeau de mariage de tante Anastasia... au siècle
dernier ; Germaine se pâmait du haut d'une forteresse improvisée
avec deux chaises Ikea, des EKEDALEN en hêtre massif (depuis l'âge de bronze
y'a pas mieux que les suédois pour les forteresses)
Entre deux grands
soupirs de pâmoison, elle m'invitait dans son palais – encore du Ikea,
un SKÖNABÄCK en polyester acheté à crédit en 72 mensualités – pour la ranimer.
A défaut de sels de carbonate d'ammonium je lui offrais une barre chocolatée Poulain
car on n'était pas riches à l'époque.
Sans mentir,
ça la requinquait illico alors elle me … mince, elle est en train de conclure
Allez ! À la
machine !!!
Pourvu qu'elle
n'enchaîne pas sur Ultra moderne solitude !
Non, elle ajoute à
mon intention « Tu mettras ta couette dans la machine ! Je suis pas
ta bonne »
J’ai un stagiaire, sans mentir, je suis son mentor, c’est
comme un poulain tu vois, depuis huit mois, et c’est une forteresse, y a rien
qui rentre, le palais de la découverte il s’en contrefout, je vais m’en séparer,
il est du genre ultrason mais sans cédille, j’arrive pas à le décontaminer,
même à l’eau de javel, pas possible un sortilège lui a été joué à la harpe, non
mais là la fantaisie ou la comédie a assez duré, là c’est plafond de verre,
dehors !
Dans cette forteresse son existence manquait singulièrement de fantaisie. Pourquoi, de ses huit palais, avoir choisi celui-ci, dont les murs épais ruisselaient
tant d’humidité que même les lessivages à l’eau de Javel ne parvenaient pas à éliminer l’odeur de moisi ?
Parce qu’il voulait oublier les jours
d’avant, les rires, les bulles dans un verre,
les arpèges d’une harpe, les caresses échangées. Tous ces gens qui
l’entouraient ne faisaient que mentir.
Son seul plaisir désormais était ses longues galopades sur le cheval qu’il
avait emmené avec lui dans son exil, ce poulain
qu’on lui avait offert il y a longtemps… Il rentrait exténué sans jamais
pouvoir chasser ce souvenir qui l’obsédait, ultrason qui vrillait son cerveau.
A huit heures ce
soir-là, nous n’étions plus que deux candidats masqués et enfermés dans la forteresse. Soudain le défi télévisé fut
lancé, l’objectif : être le premier à trouver une harpe (fantaisie de
musicien !) dans ce dédale où un poulain
ne trouverait pas sa mère. Je commençai à arpenter les couloirs, les salles
vides et les étages, m’appliquant à faire, sans vous mentir, moins de bruit qu’un sifflet ultrason quand soudain je flairais son odeur d’eau de javel répugnante. J’avalais alors une gorgée de whisky en
collant ma langue à mon palais avec
délectation, et sortant de ma cachette, je lui tranchais la gorge avec un
morceau de verre, le même qui lui
avait servi à empoisonner ma chère maman à la maison de retraite.
Il était une fois, un
pays qu’on appelait le pays dont on ne revient jamais. Tout le monde le
fantasmait mais personne ne le connaissait.
Certaines imaginations
débordantes le voyaient comme un havre de paix où tout était riche, verdoyant,
où tout poussait en toute saison. La paix régnait et le seigneur de ce pays
était bienveillant et juste. D’autres l’imaginaient comme un territoire sombre,
inhospitalier où la peur distillait son venin. La méchanceté, l’injustice, la
malveillance étaient le quotidien de ses habitants.
Il y en avait enfin, pour
croire qu’au-delà de la forteresse qui emmurait cette contrée,
il n’y avait rien.
Mais pour ceux qui
avaient franchi ce mur et atteint le pays, l’histoire commençait.
Dans les prairies
alentour, des animaux de toutes sortes paissaient paisiblement. Il y avait là
des vaches et leur veau, des brebis et leur agneau, des juments et leur poulain,
etc. Une harmonie coulait comme l’eau de sa source sur le paysage dans une
clarté rayonnante.
Et puis un bruit,
une fantaisie musicale vibrait à l’oreille du visiteur, un son
de harpe en ultrasons. Happé par les notes, il
entrait dans un palais de verre et d’acier.
Huit marches à
monter et un hall immense, en arrondi au sol pavé de dalles en marbre blanc à
peine strié de veinules rosées accueillait le visiteur dans sa froideur et sa
solennité avec une odeur de souffre. Euh ! Non, veuillez m’excuser, je me
suis laissée emportée ! Une odeur d’eau de javel plutôt
incongrue dans ce lieu irritait les narines. Au rez-de-chaussée, de nombreuses
portes fermées sans indication. Un escalier grandiose à double révolution
desservait les niveaux à perte de vue de l’édifice. Il avait son exacte
réplique qui descendait vers les tréfonds de la terre. Autant d’étages vers les
hauteurs que vers les profondeurs. Une porte s’ouvrait et le voyageur était
invité à entrer. Derrière celle-ci il avait rendez-vous avec son destin. Et
vous savez comme moi qu’on ne peut se défaire de son destin. Il est écrit dans
le grand livre.
Ce qu’il advenait
ensuite, n’est pas dit dans l’histoire puisque personne n’en est revenu. Cette
partie du voyage nous a été racontée par certains qui ont fait demi-tour avant
d’ouvrir la porte. À moins que leur destin n’avait pas prévu ce rendez-vous !!
Allez savoir !
Le désir de propreté et de nettoyage de Madame Proprette confine à l’obsession. Sans mentir, huit fois par jour, elle a le chiffon en main pour essuyer, astiquer les meubles, le sol, les vitres. Avec une énergie digne d’une sportive de haut niveau, elle court d’une pièce à l’autre pour traquer le moindre grain de poussière. Chez elle, c’est le palais des glaces d’où est exclue toute fantaisie. Elle ne s’accorde de répit qu’à la soirée pour déguster son carré de chocolat Poulain, écouter son morceau de harpe favori tout en lorgnant les traces laissées sur son miroir ou ses vitres… Demain, elle s’y attaquera avec le nouvel appareil lave vitres acheté sur télé shopping payable en trois fois sans frais.
Plusieurs jours par semaine, elle se rend dans la grande surface située à l’autre extrémité de la ville pour faire ses courses alimentaires. Madame Proprette préfère les acheter en petites quantités. Ainsi, elle se donne l’excuse de retourner dans sa forteresse, dans les rayons spécial lessives ou spécial entretien. Là, elle savoure son plaisir entre : les lingettes dépoussiérantes, les gants de ménage,les carrés en micro fibres, les rouleaux d’essuie tout, les éponges, les berlingots d’eau de javel, les bidons de savon noir, les balais, les brosses etc. Elle aime l’odeur plastifiée qui se dégage toujours un peu de ces rayonnages dans lesquels les articles sont impeccablement rangés. Elle compare les prix, les quantités, achète des produits au flaconnage différent mais qui font doublon avec ce qu’elle utilise déjà, mais qu’importe ? Elle est sécurisée de pouvoir compter sur une réserve qui augmente de semaine en semaine.
Cependant, il lui est déjà arrivé plusieurs mésaventures qui auraient pu coûter la santé d’une tante âgée. Madame Proprette l’hébergeait chez elle en attendant de la placer dans une maison de retraite.
La tante dût être hospitalisée à deux reprises pour avoir bu une première fois de l’eau de javel versée dans une bouteille en verre non étiquetée , une deuxième fois un bout de savonnette qu’elle avait pris pour un gâteau sec ; heureusement des ultra sons permirent de diagnostiquer la cause des empoisonnements…
Il est pourtant bien dit qu’il est toujours dangereux de laisser des produits d’entretien à portée de main !