28 janvier 2023

Sujet n°31 du 28 janvier au 4 février

 L'image  :



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  • Au plaisir de vous lire, bonne semaine,  merci.

MOTS EN COLERE / Tarval

 


 

Au secours, aidez-moi,

Je suis submergé par les pages du roman que j’écris,

Elles ne sont pas d’accord avec la fin de mon livre,

Et du coup, elles m’ont agressé,

Et j’essaye de m’en sortir,

Mais elles sont enragées,

Je peux juste sortir la main pour appeler des secours,

Je crie mais personne ne m’entend,

Du coup je vais céder et modifier la fin de mon livre,

Pour pouvoir me sortir de cette impasse,

Et me libérer de ces pages qui m’étouffent,

De tous ces mots en colère,

Et ainsi retrouver la sérénité,

Et me libérer de cette situation incroyable,

Où les mots prennent le pouvoir,

Qui l’aurait cru,

Je ne pensais pas que cela puisse arriver,

Et pourtant cela est bien réel,

Bon allez je m’y mets,

Je vais trouver une nouvelle chute pour mon livre,

Et ainsi je serai libre,

C’est le prix à payer,

Pour retrouver ma liberté.

 

A l'aide / K


 

 

 

Je me suis enlisée dans l’alphabet

Je coule et croule

Sous les signes typographiques

Les abréviations et les raccourcis

 

La main page 653 faisait des signes

Des pieds peut-être

Des mains sûrement

Comme perdue dans un océan de papier

Elle tentait de s’extirper de l’aspiration

S’était réfugiée dans les marges  

Et, erreur funeste, tournait tournait

Elle regrettait amèrement

De s’être embarquée dans le dictionnaire

Un Larousse édition 2005 pour le centenaire

Elle s’en voulait

De s’être engagée dans les sables mouvants

De cette recherche, quelle occasion manquée quel temps perdu…

 

L’ironie page 595 de l’histoire

Est bien qu’au temps T le Témoin

Venu de la page 1043

pour la sauver 

ne savait pas nager.

Y eut-il jamais plus cruelle 

plus cinglante illustration

De l’expression 

« perdre la main » ?

 

Poing final / Vegas sur Sarthe

 

 

Jusqu'alors je ne m'étais jamais jeté à l'eau dans l'exercice sans mes biscuits, mes rations de survie ou au moins une bouée de sauvetage - gardant précieusement sous le coude, histoire d'assurer mes arrières vu que le devant ne risque plus rien, quelque sonnet en vers et contre tout, quelque arrière-pensée de Pascal, rimes empruntées, vagues citations wikipédiennes ou un machin dans ces Zola - car j'avais trop peur de rester en rade, la plume racornie, englué dans la marge sans espoir d'atteindre jamais le bout de la ligne du quai, en proie aux affres de cette maladie honteuse que les spécialistes nomment leucosélophobie et qui transforme votre moindre petite phrase en une suite de mots insipides...

 

et pourtant c'est arrivé, sournoisement, insidieusement, je dus me rendre à l’Évidence (si vous voulez l'adresse, n'hésitez pas à me la demander), j'étais bel et bien desséché, contaminé, ramené au rang des scribouillards stériles qu'une arthrose galopante submerge depuis la partie supérieure du cortex frontal gauche jusqu'au bout du petit doigt (qui n'avait à cet instant rien à me dire) et qui fait d'eux la risée ironique des médias en tous genres... alors tandis que je tirais la langue tel un misérable caméléon à la recherche d'un insecte suicidaire, j'ai senti l'invisible main d'une sirène tenir ma main et tracer ces mots - ceux-là même que vous lisez - des mots d'excuse, d'explications confuses, de vaines justifications, bref (pour faire court) j'étais sec, éteint, inutile, en un mot infécond à tel point que j'accueillis comme une délivrance ce coup de point final .