26 avril 2025

DROLE D'HISTOIRE / J. Libert

 



DRÔLE D’HISTOIRE
 
 
    Je me souviens encore, comme si c’était hier, de cette curieuse histoire.
 
    Dans ce parc sauvage, laissé à l’abandon, poussait le chiendent parmi les herbes folles et les tiges épineuses. Il avait longtemps appartenu à un fermier sans héritiers. De son vivant, celui ci faisait paître un troupeau de moutons qui se chargeait de le tondre régulièrement.
 
   À son décès, la ferme avait été vendue, pour une bouchée de pain, à un jeune couple. Il avait habité là, quelques mois, mais sa disparition soudaine avait intrigué le village tout entier pendant des années. Sa recherche demeurée vaine, la maison fut squattée à diverses reprises. Faute d’entretien, les intempéries achevèrent sa destruction.
 
    C’est sur ce lieu, à l’histoire trouble, que Monsieur Teste avait installé, un beau soir d’été, son vieux fourgon noir, sommairement équipé, tracté par une voiture d’un rouge délavé, plus vieille encore. Hormis son nom, nous ne connaissions rien de Monsieur Teste. Il parlait peu, dans un langage inconnu. Tout ce que nous allions savoir c’est qu’il vivait avec une petite fille de cinq, six ans. Lui, avait les cheveux bouclés, noir de jais, le teint basané. Sa fille qu’on appelle Marlène, elle, avait le teint pâle et les yeux couleur de mer.
 
    Il est resté le mystérieux étranger vivant à l’écart des choses et de la douce indifférence du monde.
 
    En soirée, il s’asseyait sur son pliant de toile, adossé à son fourgon. Il suivait du regard le fil de l’horizon, comme si, au-delà, il retrouvait et communiquait avec les siens.
 
    Mais un jour, au crépuscule, on l’a aperçu, entouré de deux gendarmes qui l’ont embarqué avec la petite fille, dans leur camionnette. Personne ne les a jamais revus.
 

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