RESTEZ AGILE
RESTEZ AGILE
L’intrus
Fatigué !
Fatigué,
épuisé je suis !
Je ne
pourrai pas faire un pas de plus.
Je
n’aspire qu’à rentrer et me plonger dans le canapé.
Allez, un
dernier escalier, une dernière marche, la clé dans la serrure, appuyer sur la
poignée, ouvrir la porte. L’appartement plongé dans le noir. Mumm, il fait bon,
frais juste comme il faut. Je crois quand même que je vais passer par la
cuisine. Une bonne bière ! Non, trop loin, direct vers le canap’. Ligne
droite, la girafe Sophie couine sous mon pied. Je croyais que les enfants
étaient chez ma mère. Pas d’autre bruit. Les voitures dans la rue, le voisin
qui joue du violon plutôt bien, des enfants dans l’escalier. Un glougloutement
d’eau quelque part dans l’immeuble. Rien de plus, rien de désagréable, un fond
sonore ordinaire et rassurant.
Le canapé
est là qui me fait signe de le rejoindre. Je me déchausse, j’enlève ma veste,
puis mon pull ainsi que mon pantalon. A l'aise!
Et enfin,
je me laisse tomber lourdement et goulument dans la douce quiétude du sofa
défoncé, là où mes siestes ont été les meilleures.
Et puis
un cri. Une griffure. Une bosse.
Je me
relève comme un ressort de son fourreau. Un feulement accompagne ce geste.
C’est quoi ça ? Un chat ! Je dirais même un chaton ! Mais d’où
il sort ?
Ah !
C’est vrai. J’ai donné mon accord après des mois de négociations. Et te voilà
là ! Au pire endroit qu’il soit. C’est mon canap’ et je ne suis pas
supposé le partager. C’était pas dans nos accords.
Oust !
Va faire la sieste là où on t’accepte, la chambre des enfants. Et laisse-nous
tranquille mon canapé et moi. Sinon, c’est la porte !
Chapristi !
Ha voilà bien les jeunes ! Ça chatte jusqu’à pas d’heure et le matin, impossible de les réveiller ! Depuis qu’il s’est inscrit sur « Mon Minou », mon chaton se gave d’infos comme d’intox et prétend m’imposer ses goûts fluctuants en matière de litière, de croquettes, de fontaine à eau et que sais-je encore… Dès qu’il ouvre un œil, il se passionne pour les aventures, faits et méfaits d’une multitude de chats de par le monde, baille d’admiration devant des stories postées par des humains qui bêtifient ou concoctées par l’intelligence artificielle, et si je lui enlève mon téléphone, il se plante devant l’ordinateur. C’est que mon chat est un pro de la souris !
Sur « Miaougram » il suit Félix, un influenceur de première. L’autre jour il m’a miaulé qu’il rêvait d’avoir, comme lui, sa tête sur des boîtes. Moi, je lui ai répondu qu’il fasse gaffe à ne pas finir « dans » les boîtes ! C’est qu’il serait capable d’y laisser sa peau, et il n’y en a même pas assez pour faire un manchon.
Allez hop, petit, va falloir penser à se dégourdir les pattes et reprendre du poil de la bête !
Il y a des moments où
le trop est trop !
Le geai, perché
sur une branche tordue, poussait des cris rauques, comme s'il partageait ma
fureur. Son aile battait l'air avec
une nervosité qui résonnait avec la tempête en moi. J'avais trop encaissé, trop
courbé l'échine. Dans ce cas, il n'y
avait plus de place pour la patience, plus d'espace.
La haine grondait dans ma poitrine comme
un orage prêt à éclater. Chaque goutte d'eau
qui tombait du ciel semblait nourrir le feu qui brûlait en moi, au lieu de
l'éteindre. Sur cette aire désertée
par la raison, je serrais le manche de la hache,
mes doigts blanchis par la force que j’imprimais. J'avais longtemps espéré un
semblant de paix, une issue plus
douce. Mais même la taie qui
recouvrait autrefois mes nuits s'était imprégnée des ombres du doute et du
ressentiment. Il n'y avait plus de retour possible. Seul restait le fracas de
mes pensées, la lame de ma colère prête à s'abattre sur tout ce qui entravait
ma liberté. Il ne me reste plus qu’à jouer à pile ou face ou aux dés.
Alphabétiquement vôtre
Kevin est un cas :
Hâlé, hardi et taillé à la hache
Trait distinctif : oeil droit marqué d'une taie
Rusé même s'il n'en a pas l'air
Doué pour les jeux de dé
Optimiste quand tout part à vau l'eau
Gai comme un pinson, criard comme un geai
Ne cède jamais à la haine
Les défis lui donnent des ailes
Profession : gardien de la paix
Quelquefois un peu "faux-cul"...
Mais, bon...on l'aime !