03 juin 2023

Soixante quatre ans et des poussières / Vegas sur Sarthe

 


 Aujourd'hui j'ai quarante neuf balais.

C'est pourtant pas si vieux que ça mais au secrétariat de l'usine les filles disent que c'est la moustache qui me vieillit.

Quand j'ai débuté j'en avais dix huit et des poussières ; à l'époque il me fallait un an pour en faire un. Le contremaître disait que je bossais comme un manche.
Avec les années j'ai acquis de l'expérience mais j'ai gardé le même rythme : un par an.
Bébert dit que si on en fait plus on nous en demandera encore plus.

Avec la nouvelle réforme des retraites je devrais encore en produire seize ou dix sept, après quoi … du balai comme dit le contremaître.

C'est ce qu'on appelle faire le ménage.

Je ne sais pas ce qui me retient de foutre le feu à tout ça ; peut-être pour épargner les filles du secrétariat qui sont mignonnes, elles portent leurs balais bien mieux que moi et n'ont pas besoin qu'on y mette le feu.

Les nouvelles secrétaires ne jurent que par le robot aspirateur.

Si ma mère entendait ça, elle qui disait justement « le vieux balai connait les coins »

Allez ! J'y retourne. Je ne voudrais pas être en retard pour ma retraite

 

 

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