par Jill Bill
par Ghislaine
par Marie Sylvie
Voyage par procuration :
Je ne peux quitter mon logement
Alors je consomme tonne d'ouvrages.
Vos enquêtes ouvrent mes yeux largement
Autant que vos pas, aux pôles, aux steppes, aux nuages.
Encyclopédies, journaux, romans
Je dévore tout ce qui transporte mes sens.
Vos jungles foulées, j'en sens l'humide verdure.
Les rues peuplées, j'y vois les regards effrayés.
Instants furtifs immortalisés sur papier.
J'ai tout de même un rêve fou.
Tenir en mes mains un document
Qui ne contiendrait rien
Avec pour seul titre
Pages blanches pour esprits libres.
Balade matinale
Il n’a échappé à tous ceux qui me
connaissent que ma chienne Neige pose pour la photo. Souvenir car elle est
partie à l’âge vénérable de 19 ans. Mais en voyant toutes ce puzzle, les
souvenirs affluent ! Un particulièrement ! Un matin alors que je
venais de me presseur mon citron quotidien et ajouter de l’eau tiède, il parait
qu’il y a plein de vitamines et que cela nettoie le foie, j’ai vu les chaussons
de danse de ma petite Jeanne. Lors de sa dernière visite, elle avait dû oublier
de les remettre dans son sac. Heureusement comme une bonne danseuse, elle en a
plusieurs et je lui avais même montrer la photo de la tombe de Serge
de Diaghilev, prise à Venise. Elle s’était montrée très intéressée par
les photos de l’album et avait pris le temps de compulsé d’autres albums de mes
voyages. Le masque inca l’avait fortement impressionnée tout en jade matière précieuse
pour ce peuple disparu et le petit tuk tuk guatémaltèque rouge ; nous
avions pris un mémorable fou- rire quand j’avais prononcé le mot : trimballe
couillon !
Mon jus de citron bu, et je me dépêchais
car Neige se manifestait pour sa sortie matinale. Attrapant la laisse non sans jeter
un coup d’œil au tableau accroché la veille un bord de mer dégotté dans le vide
grenier du village, je suis sortie de la maison. De suite la chienne, se
précipita vers le portail qui comme d’habitude n’était pas fermé ; elle
courut immédiatement vers le champ voisin dans le but certain de « lire
son journal canin » alors que moi je m’arrêtais pour contempler mes belles
ancolies et les molènes de Phénicie mauve qui se balançaient dans la brise
légère de cette belle matinée. Au loin Neige aboyait, elle m’appelait ; je
sortis de ma rêverie et la rejoignis. Elle était à l’arrêt devant un objet
bizarre. Probablement oublié par un vendeur la veille, je reconnus un engin qui
servait à tricoter des chaussettes. Je l’ai ramassé et tout le long de la
balade je me suis demandé ce que j’allais en faire. Finalement dans la vitrine
des curiosités, il serait du plus bel effet.
Plutôt que se détendre avec un waterphone,
Un gadget aux effets incertains.
Il vaut mieux prendre sa vespa, le chien,
Pour aller près des vagues qui fredonnent.
On ne peut pas toujours chausser des demi-pointes,
En regardant un masque à la maison,
A penser près du chien, à des courtepointes,
Il faut savoir changer d’horizon.
Un thermos frais de citronnade,
Une serviette, un moyen de transport,
Vers la calanque, passe muscade.
Après, la rocaille, arrive à bon port.
Solitude et nature,
Détente et sérénité.,
Valent mieux qu'un waterphone.
Au milieu de cette verdure,
La plage s'étend devant l'eau bleutée,
Tout n'est que détente qui impressionne.
Petits éclats de joie
Ce soir, Monsieur Mozaïc, prénommé Alain,
se remémore tous les moments doux et sereins
qui ont "émaillé" son quotidien:
le thé au citron du matin,
les premières fleurs dans le jardin,
la promenade, sur la plage déserte, avec le chien,
le spectacle de danse classique, un peu plus loin,
devant les vagues turquoises et les rochers bruns,
au son d'un carillon cristallin...
La petite danseuse qui lui avait donné son 06, enfin...
un clin d'oeil du destin ?
La fin du chagrin ?
On verrait bien demain...
Rex, le chien de la maison, fatigué de sa promenade matinale, s’allongea sur la terrasse pour entamer une longue sieste, protégé du soleil par le masque Africain en céramique bleue rapporté d’un lointain voyage.
Sur le chemin du douanier, il avait eu tout le loisir de gambader, humant l’air parfumé des citrons prêts à mûrir, des fleurs mélangées aux herbes folles souvent agitées par les vents marins et des embruns salés venant du grand large.
C’était l’heure la plus chaude de la journée. Après s’être exercées plusieurs heures, les fillettes de l’école de danse située en contrebas de la maison avaient ôté leurs petits chaussons et se détendaient ou dormaient sur des lits d’appoint en toile installés dans leur salle. Un grand calme succéda à la musique des répétitions avec, seulement, le chant lancinant des grillons.
Mais l’air transparent et bleu vibrant de chaleur fut bientôt obscurci par une brume épaisse et piquante. Au loin, les citronniers se consumaient. Des flammes commencèrent à lécher les broussailles, tandis que les pompiers s’activaient pour éteindre les premiers brasiers.
Multi-culturel.
« Mes amis, Merci d’avoir répondu si
nombreux à notre invitation. C’est vrai que le buffet offert par les
commerçants de la ville est impressionnant et appétissant. Ils ont mis en œuvre
tous leurs talents pour nous donner le meilleur. Un grand merci à eux.
Si nous vous avons réuni ici ce soir, c’est
tout d’abord pour nous excuser de ces travaux bruyants et gênants qui ont
pourri la vie de la cité pendant plusieurs mois. Nous vous remercions aussi de
ne pas avoir noyer la municipalité de vos griefs et de vos doléances pendant
cette période. Mais vous verrez, c’était pour la bonne cause !
Nous vivons un évènement exceptionnel comme
vous l’imaginez. Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre que la qualité
des cartons d’invitation pouvait annoncer autre chose qu’un apéro dînatoire
pour mon anniversaire. Même si c’est important ……… surtout pour moi.
Non, ce qui nous relie aujourd’hui c’est le
lien justement. Le lien que nous voulons créer dans cet espace.
Située au cœur de la cité dans un quartier
classé, la caserne des pompiers de la commune était obsolète et vétuste. Le
nombre de véhicules a beaucoup progressé et la circulation intra-muros était
devenue un casse-tête pour tout le monde, sans compter les bureaux du SDIS trop
à l’étroit. Avec le concours des services de la préfecture, nous avons pu leur
trouver un site en périphérie qui répond au mieux à leurs besoins.
Les locaux désaffectés devaient retrouver
une utilité. Nous avons donc procédé à un appel à projet. Ce fût un moment très
intéressant que le dépouillement, presque plus que celui des élections de la
Reine de la foire aux célibataires. L’imagination fertile de nos concitoyens
n’a eu de cesse de nous surprendre et au passage nous amuser. Merci à vous
d’avoir répondu avec tant de dynamisme.
Une commission s’est réunie après une
première sélection et celle-ci a retenu le projet que vous allez découvrir dans
quelques instants. Je vous sens impatients, c’est normal.
Maintenant, je vais demander à Mme Dupont
responsable de la culture, des affaires sociales et scolaires de venir vous
expliquer……………. »
- Mais qu’est ce vous faîtes ?
- On est pas venus là pour vos blablas
pendant des plombes. On va se désaltérer et se sustenter avant que les élus
rivés au buffet aient tout englouti. Mais vous pouvez continuer à causer, on
vous écoute d’une oreille.
Madame Dupont se saisit du micro et lit son
speech au pas de course.
« Nous avons créé ce lieu en pensant qu’il
devait être un incontournable dans la vie de tout un chacun des administrés au
sein de la commune. Vous trouverez au rez-de-chaussée la médiathèque ainsi que
la ludothèque. Au premier étage, différentes salles pour des arts créatifs. Il
y aura des salles prévues pour la poterie, le dessin et la peinture, la
musique, la photo, etc... Mais nous avons aussi recruté un botaniste, un
dresseur de chien, une prof de danse. »
- Vous avez gardé la barre de
pompier ?
- Euh, non, je ne crois pas.
- Dommage, il y aurait pu avoir des cours
de pole dance !
Merci tout d'abord pour vos participations, vos textes variés, vos commentaires, votre fidélité !
L'été, venons-y !
Le rythme hebdomadaire de Mil et Une se poursuivra comme habituellement jusqu'au sujet 147 (semaine du 5 au 12 juillet).
Pendant les deux quinzaines, la publication des textes reçus pourra se faire au fil de l'eau, à mesure, plutôt que groupée le samedi, et le nombre de textes que chacun pourra adresser ne sera pas limité.
Nous retrouverons notre rythme hebdomadaire pour le sujet 150 à partir du 23 août qui sera en quelque sorte notre sujet de rentrée !
Bon été à tous, à bientôt !
Le tableau primordial :
Notre planète sur une grande toile noire
La plus belle des œuvres d'art.
Vu d'ici, le cancer que nous sommes
N'est pas visible.
Elle subit pourtant nos assauts, la pomme.
Dans une vision utopique il existe des tropiques
De grandes étendues immaculées de l'homme.
Personnes pour en témoigner la beauté
Rien que des espèces non-humaines
Reprenant leur trône, souveraines.
Si je suis là pour rêver
Si je suis là pour encrer
C'est que notre fin est proche.
À ignorer les avertissements
Nous précipitons la fin de la roche.
Rentrer dans une lecture,
S’identifier à un cosmonaute,
Partir en villégiature,
En restant dans son fauteuil sans faute,
Est-ce de là de l’uchronie
A moins que ce soit de l’utopie.
C’est un rêve qui vous transporte,
Vous voilà en habit de spationaute,
Et votre imaginaire vous transporte,
Dans la stratosphère la plus haute.
Mais voilà une turbulence,
Il y a quelqu’un qui sonne à la porte,
C’est le facteur qui vous apporte,
Cette note de discordance.
Vous n’êtes pas en scaphandre,
Voyageant entre les étoiles,
Il ne faut pas vous méprendre,
L’irréel se déchirant comme un voile.
COUAC
J’ai l’air cool, comme ça, mais ça a pris un temps fou pour trouver la bonne position, avec ces poches et ces tuyaux entre la dernière couche et ma peau et les sondes de toutes sortes intégrées à mon accoutrement, toujours connectées à l’ordinateur, qu’il faut éviter de malmener. Ils s’y sont mis à quatre pour me coincer là, sans pouvoir me dire quand ils reviendront me chercher mais en me conseillant de ne pas relever ma visière. Pourquoi ? Pas d’explication.
Dire que c’était mon dernier vol avant la retraite, un truc de routine, un aller-retour banal Terre-station orbitale pour leur livrer du bœuf mironton en tube, du Chardonnet en paillettes, des rillettes déshydratées et d’autres trucs tout aussi goûteux, de quoi patienter jusqu’à la relève…
Décollage sans accroc, voyage et arrimage parfaits et rentrée de même. C’est quand on nous a récupéré en mer que ça a foiré : mon coéquipier a été débarrassé de son casque en deux temps-trois mouvements, et tout naturellement on l’a aidés à sortir de sa combinaison. Mais quand mon tour est arrivé, impossible de tourner les ailettes des vis de mon casque, et à force d’insister, elles se sont cassées ! Dès lors, tout étant solidaire, impossible de m’enlever ma tenue. En dehors des vols, je peux vous assurer que le costume est loin d’être idéal !
Lorsque nous avons réintégré la base, les ingénieurs avaient eu le temps de mener leur enquête et de découvrir que, dans un souci d’économie, ces maudites vis ont été commandées par internet sur un site chinois et que ce matériel n’est pas garanti. Ces mêmes ingénieurs sont actuellement réunis pour chercher le meilleur moyen de me sortir de là sans ciseaux, sans pied-de-biche et sans chalumeau, sans rien endommager – toujours par économie.
Mon énervement, qui monte d’heure en heure, augmentant ma pression sanguine et la température interne de mon tout-en-un, est maintenant porté à son comble par les réflexions des collègues qui viennent à tour de rôle lancer des vannes qui n’amusent qu’eux, du style : « Ne le dérangez pas, il est dans sa bulle », « il est un peu renfermé en ce moment », ou « il a attrapé la grosse tête ». Il y en a même un qui m’a demandé : « Y a de l’eau, au moins, dans ton aquarium ? »
S’il y en a un qui m’appelle Némo, je lui fous un coup de boule et croyez-moi, le matériel, c’est du lourd !
Cette histoire est loin d’être glorieuse pour le programme, mais penser qu’elle ne va pas fuiter relève de l’utopie…
Exil
De là-haut j'ai appris en lisant le journal
De la Terre flétrie, l'effondrement fatal
Je croyais un beau jour pouvoir y redescendre
Et respirer enfin sans ce maudit scaphandre !
Atterrée je feuillette au fond mon fauteuil
Un livre d'autrefois et mon cœur est en deuil.
Humains, qu'avons nous-fait ? Mon Dieu qu'elle était belle
Avant de devenir cette immense poubelle !
Ce livre me décrit les arbres , l'eau, les fleurs
Et de chaque saison les subtiles senteurs.
J'y vois océans bleus, rivières et montagnes
Vallons paisibles, lacs, champs et vertes campagnes.
J'y vois aussi hélas, des plages polluées
Le désert qui avance, les forêts brulées
Les fleuves asséchés, la guerre, le saccage...
La laideur peu à peu, remplit toutes les pages.
C'était la perle bleue de notre galaxie
Rêver de la rejoindre était une utopie.
En exil, éperdue sur ma boule lointaine
Je sais que plus jamais je ne serai terrienne.
Je me reveille en pleurs. C'était un cauchemar
Souffle court je me dis :"Est-il vraiment trop tard ?"
La Terre est un joyaux, il nous faut la défendre
Pour n'avoir pas besoin d'y survivre en scaphandre.